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3.1 Retrouver son poids de forme

  • Photo du rédacteur: annem111
    annem111
  • 2 juin 2021
  • 6 min de lecture

Dernière mise à jour : 25 juin 2021


A l’issue de la période de renutrition, la grande majorité des personnes se trouvent au-dessus de leur set-point, et par conséquent en situation de surpoids.


Cette notion de surpoids est très relative d’un profil à l’autre : par exemple, le fait de peser 65 kilos pour 1 mètre 70 peut constituer un état de surpoids pour certaines femmes, et un état de sous-poids pour d’autres. Il est donc très important de ne jamais se comparer, de se souvenir que tout le monde n’est pas fait sur le même moule, et qu’au même titre qu’on ne peut pas « contrôler » sa taille ou sa pointure, il est impossible de « décider » quel devrait être son set-point. Nous pouvons, tout au plus, avoir une vague idée de la fourchette dans laquelle il se situe.


L’IMC (Indice de Masse Corporelle) n’est d’ailleurs guère utile ici : selon sa constitution, on peut très bien avoir un IMC médicalement « correct » (entre 18.5 et 25), et être malgré tout beaucoup trop mince, ou au contraire bien au-dessus de son poids d’équilibre. A l’inverse, certaines personnes ayant une morphologie très particulière, peuvent se trouver naturellement à leur poids de santé alors qu’elles sont techniquement en-dessous (IMC < 18.5) ou au-dessus (IMC > 25) des normes.


Au final, tous ces chiffres ne sont pas d’une grande pertinence, car souvenons-nous : nos organismes sont biologiques, pas mathématiques !



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Après l’expérience du Minnesota, tous les sujets sans exception sont revenus aux alentours de leur poids de départ, et ce sans faire aucun régime (dont on imagine bien qu’ils étaient définitivement « vaccinés »). Cela ne manque jamais de surprendre les personnes qui ne connaissent pas le principe de set-point ; elles s’imaginent que ces hommes, avec leurs menus à plus de 5000 calories, ont dû fatalement devenir obèses. C’est mal comprendre notre corps qui, on l’a vu, n’a pas du tout « envie » d’être gros.


Une étude menée en 1964 sur des prisonniers volontaires de l’état du Vermont le confirme : après avoir passé quatorze semaines à manger le plus possible (souvent entre 6000 et 8000 calories par jour) afin de prendre le plus de poids possible (en moyenne seize kilos), les volontaires sont tous revenus à leur poids de départ, en l’espace de quelques semaines, en reprenant leur alimentation habituelle. Durant la période de prise de poids forcée, les chercheurs (E. Sims, E. Horton et L. Salans) ont formulé plusieurs remarques intéressantes :


- Manger de telles quantités semblait très difficile pour des personnes non affamées.

- La prise de poids passait souvent par des phases de plateau.

- Le métabolisme des sujets a considérablement augmenté (ce qui est resté vrai pendant la phase d’amincissement, et semble avoir favorisé celui-ci).


On remarque que les phénomènes décrits ici sont le pendant exact de ce que l'on observe au cours de l’amaigrissement forcé (difficultés pour maintenir la diète, phases de plateau, métabolisme fortement impacté, puis retour automatique au poids initial). Il semble donc tout aussi difficile de parvenir et de se maintenir à un état de surpoids, que de parvenir et de se maintenir à un état de sous-poids : le corps s’adapte aux variations alimentaires et « lutte » pour protéger son set-point. Il n’a ni « envie » d’être trop maigre, ni « envie » d’être trop gros.



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Lorsqu’elles font une renutrition, la plupart des personnes qui étaient préalablement en sous-poids excèdent leur set-point dans des proportions assez comparables (environ 10%). L’organisme semble donc avoir besoin de ce petit surplus, pour revenir ensuite à un état d’équilibre. Il est important de connaître ce mécanisme ; dans le cas contraire, on pourrait être tenté de penser que le set-point, soumis à un phénomène de « yoyo », a irrémédiablement augmenté. Il n’est pas exclu, en effet, que de nombreuses pertes et reprises de poids puissent, à terme, faire évoluer le poids d’équilibre peu à peu à la hausse. C’est une des hypothèses scientifiques actuelles quant aux causes de l’obésité.


Il ne faut toutefois pas en tirer de conclusions alarmistes, les personnes ayant connu des TCA n’ont certainement pas besoin de cela !


A ce sujet, on peut préciser que le principal objectif de l’étude du Vermont était d’examiner l’influence de la prise de poids sur les adipocytes (cellules stockant les graisses). Les conclusions de l’étude ont montré que chez tous les volontaires, la prise de poids n’a strictement pas augmenté leur nombre : les adipocytes se sont juste remplis, puis vidés (on nous fait parfois croire que la multiplication des adipocytes lors de la prise de poids est systématique, irréversible et prédispose à une obésité future, ce qui est faux dans la grande majorité des cas).


Pour avoir moi-même connu des variations de poids importantes et être passée par toutes les formes de stress possibles liées à cela, je comprends très bien les inquiétudes que les personnes peuvent avoir. Être conscient de la diversité des morphologies n’empêche pas de se montrer positif et rassurant concernant le poids. La plupart du temps, les anciens malades de TCA retrouvent, dans la mesure où ils réapprennent à bien se nourrir, une silhouette bien plus svelte que ce qu’ils imaginent. A titre d’exemple, j’ai aujourd’hui un poids beaucoup plus bas qu’à l’époque où je faisais tout pour le diminuer (et je suis loin d’être la seule, c’est une remarque très courante). De nombreuses personnes ayant connu le surpoids toute leur vie découvrent ainsi avec stupéfaction que c’étaient précisément leurs comportements pour mincir qui les faisaient s’empâter !



Il peut être difficile de s’en convaincre tant que l'on n'en fait pas soi-même l’expérience, mais c’est pourtant la vérité :


- Les restrictions font grossir (ou faire des crises de boulimie, ce qui revient au même).


- Manger à sa faim et « sans tabou » fait mincir.


C’est tout le contraire de ce que nous enseigne la « culture des régimes », et c’est sur cette voie qu’il va désormais falloir cheminer.



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Suite à la période de renutrition, il n’y a donc rien de spécial à faire ou à mettre en place pour perdre du poids. Les principes alimentaires qui ont été établis (repas réguliers, structurés et nourrissants) ont tout intérêt à être maintenus. Il n’est pas utile de vouloir manger moins copieux, moins gras, ou moins sucré. Au contraire : ce serait là réintroduire des restrictions volontaires… avec les risques que nous connaissons !


L’amincissement n’est sain et durable que lorsqu’il est involontaire, c’est-à-dire lorsque nous laissons notre corps se réguler naturellement.


Avec la phase de renutrition, nous avons envoyé à notre organisme le signal qu’il peut de nouveau nous faire confiance, que nous avons retrouvé un environnement alimentaire foisonnant, et que la famine n’est plus du tout d’actualité. Nous avons ainsi fait cesser les crises de boulimie. Dans le même temps, nous avons enclenché les mécanismes qui vont nous amener lentement mais sûrement à notre poids de forme.



Plusieurs facteurs entrent alors en jeu :


- Avant de baisser, le poids commence par se redistribuer ; les surcharges localisées (par exemple autour de la taille, au niveau du visage parfois bouffi…) se répartissent naturellement de façon plus harmonieuse.


- Le métabolisme ayant fortement augmenté, on se montre plus enthousiaste et plus dynamique, ce qui maintient un excellent niveau de dépenses énergétiques.


- Une fois la faim extrême calmée, l’appétit continue de diminuer graduellement, en fonction des jours, des activités et de nombreux autres paramètres ; cela est très subtil et il est probable qu’on ne le remarque même pas.


- Les envies alimentaires se modifient peu à peu ; par exemple, on peut avoir un peu plus souvent envie de saumon/brocolis que de barres chocolatées (là encore, c’est involontaire, subtil, et ni « tout noir », ni « tout blanc » !).


- La production d’hormones étant rétablie, toutes les fonctions opèrent de nouveau à plein régime (pouls, tension, température, digestion, circulation, libido), ce qui favorise la dégradation des graisses.



A ce stade, les personnes qui le souhaitent peuvent en outre reprendre une activité sportive plus régulière ou plus intense. Toutefois, celle-ci ne doit pas viser à créer un déficit énergétique (ce qui reviendrait à une restriction calorique) : la pratique sportive aura donc tendance à augmenter l’appétit, et il faudra y répondre en mangeant à sa faim (donc en plus grandes quantités). Ceci n’empêche pas l’amincissement, mais ne le favorise pas spécialement non plus. Le sport peut de nouveau être pratiqué à des fins de détente, de plaisir et de bien-être… ce qu’il n’aurait jamais dû cesser d’être !


L’amincissement involontaire se fait ainsi sur plusieurs mois après l’arrêt des crises de boulimie ; la meilleure façon de l’encourager étant, on l’aura compris, de ne surtout pas chercher à accélérer les choses.





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