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2.3 Gestion de crise

  • Photo du rédacteur: annem111
    annem111
  • 2 juin 2021
  • 6 min de lecture

Dernière mise à jour : 21 juin 2021


Nous venons de voir les principes concernant les repas.


Maintenant, que faut-il savoir au sujet des crises ?


La question de faire des crises ou non est, selon moi, assez secondaire. En cela, je veux dire qu’il n’y a pas vraiment lieu de « s’empêcher » de faire des crises : ce n’est pas le plus important car, si les bonnes pratiques alimentaires sont mises en place, les crises s’espaceront assez vite et naturellement. On s’évite ainsi une contrainte supplémentaire, qui serait de devoir résister aux crises par la force de la volonté. Il est plus efficace de considérer que les crises ne sont pas un problème, et qu’elles disparaîtront d’elles-mêmes quand ce sera le moment (ce qui est absolument le cas !).



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La principale question est donc celle-ci : en cas de crise, quelle conduite tient-on ?


C’est un point très important pour la guérison. Il faut, en effet, abandonner toute pratique de compensation : vomissements, prise de laxatifs ou de diurétiques, jeûne (sauter un ou des repas) ou sport intensif (nous reviendrons sur ce point plus en détail ultérieurement).


Pourquoi ?


Déjà, parce qu’on l’a vu, il ne faut pas envoyer au cerveau le signal que la nourriture peut être « reprise » ou limitée d’une façon ou d’une autre : à chaque fois, cela maintient le

« mode famine » actif.


Ensuite, parce qu’il faut se réhabituer à garder toute la nourriture que l’on ingère, même quand il s’agit d’un gros dérapage hors repas, d’une orgie de sucre ou autre. En cela, on doit en quelque sorte reprogrammer ses habitudes, qui ont été déréglées depuis qu’on a des TCA.


On peut en effet considérer certaines facettes des TCA comme des addictions : une mauvaise habitude qui a été répétée, répétée, et répétée encore, devient un schéma nocif qui programme le cerveau de façon inadéquate. Une fois que le cerveau a enregistré cette mauvaise habitude (par exemple tabac, alcool tous les jours, etc.), il l’assimile à tort à un de ses besoins vitaux (dormir, manger, boire de l’eau…) et envoie des impulsions vers l’habitude nocive, exactement comme s’il s’agissait de besoins réels. C’est ce qui rend le sevrage si difficile : la personne vit la privation de l’habitude nocive comme si elle était liée à un besoin vital. Là encore, il semble que le cerveau reptilien soit impliqué : il est le siège de la régulation des besoins vitaux, mais aussi celui des automatismes (les addictions seraient donc un « bug », une information erronée dans le programme).


Ce n’est pas la nourriture en elle-même qui provoque l’addiction. Nous sommes tous dépendants de la nourriture puisque c’est un besoin vital, il n’y a aucun problème à cela. Certains voudront peut-être discuter ce point car ils estiment que quelques-uns de nos aliments (le sucre en particulier) sont de nature « addictive » ; pour avoir beaucoup tourné autour de la question et testé sur moi-même différentes choses, je ne pense pas que ce soit la bonne piste pour soigner les TCA. De toute façon, c’est un fait : quand on lève les restrictions et qu’on retrouve une alimentation adaptée, on rétablit toujours un rapport sain à la nourriture, sucre ou pas. Donc là n’est pas la question.


Le problème n’est pas l’addiction à la nourriture (quoi qu’en disent certains

« spécialistes ») ; le problème, c’est la dépendance aux idées et aux comportements de restriction.


Se sevrer des comportements de compensation est donc la toute première étape. Pour cela, la méthode est la même qu’avec la cigarette : lorsqu’on reçoit l’impulsion à faire le comportement nocif (se faire vomir par exemple), il faut réussir à percevoir cette impulsion comme un signal erroné envoyé par le cerveau (puisque ce n’est pas un besoin naturel). Il faut d’une part comprendre le processus (l’habitude nocive est un leurre), et agir de façon adéquate d’autre part (ne surtout pas faire le comportement).


Ainsi, à chaque fois qu’on ne répond pas à l’impulsion, le cerveau efface un peu plus le mauvais schéma, et il se reprogramme petit à petit. Cela s’appelle la plasticité cérébrale, c’est-à-dire que notre cerveau a la capacité de se changer lui-même, à chaque fois que nous changeons notre façon d’agir. Même si cela semble impossible au début, en l’espace de quelques semaines, les impulsions s’estompent naturellement, car elles cessent d’être assimilées à des besoins réels. Les mauvaises habitudes sont peu à peu perçues de nouveau comme ce qu’elles sont vraiment : des comportements malsains et absurdes, qui n’apportent aucune satisfaction.



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Certains auteurs estiment que les crises de boulimie en elles-mêmes peuvent être traitées de cette façon. Il faut alors considérer qu’elles ne sont pas des besoins réels, mais des impulsions erronées envoyées par le cerveau reptilien. C’est par exemple l’approche de Kathryn Hansen (Brain over Binge). Ainsi, le sevrage ne repose pas sur le principe de volonté, mais sur des techniques de « conscience de soi », couplées aux propriétés de neuroplasticité.


Il est possible que cela fonctionne, mais dans tous les cas, il faut retenir deux choses :


- Cela ne dispense pas de passer par la renutrition (car le besoin de manger abondamment, lui, est bien réel : Kathryn Hansen insiste sur ce point aussi).


- Il ne faut pas que cela soit vécu (et donc perçu par le cerveau) comme une restriction.


Ce second point peut être assez difficile à cerner, c’est pourquoi j’estime qu’il ne faut pas se tracasser pour cela. Si la personne commence à se convaincre qu’elle doit, de façon rigide, s’empêcher de « criser », elle risque au contraire de renforcer ses pulsions. Dans la mesure où on met en place les pratiques nécessaires pour que les crises disparaissent d’elles-mêmes, je pense pour ma part qu’il n’est pas utile, ni même souhaitable, de chercher à s’empêcher de « criser ». En revanche, il est indispensable de s’empêcher de purger. Car ce sont les purges (et non les crises) qui peuvent compromettre le processus de guérison.



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En s’empêchant de compenser les excès, on va en outre travailler à réimplanter des idées correctes dans son fonctionnement. C’est en effet l’occasion de tirer les conclusions pratiques des connaissances sur le métabolisme et le jeu infernal des restrictions.


Donc au lieu de se dire :

- Un trop-plein de nourriture me fait automatiquement grossir.

- En appliquant des restrictions, je limite la prise de poids.


Il convient maintenant de se dire :

- Un trop-plein de nourriture est naturellement régulé par le corps.

- Appliquer des restrictions dérègle ces mécanismes.

- Appliquer des restrictions entraîne de nouvelles crises (et à terme la prise de poids).



Il ne faut pas voir là une forme de ruse ou de « pensée magique » : ce sont des constats bien réels, une façon correcte de voir les choses quand on n’a pas de TCA.


Les TCA sont le fruit d’un « lavage de cerveau » dû à la culture des régimes. Ils sont entretenus par des idées toxiques qu’il faut désamorcer dès qu’on en a l’occasion.

Ainsi, à chaque fois qu’on renonce à utiliser une technique de compensation, on rétablit des habitudes saines dans son cerveau et, dans le même temps, on se prouve que les principes sur lesquels on fonctionnait jusqu’alors n’ont en fait aucune pertinence. La

« petite voix » des régimes (et donc des TCA) a de moins en moins de pouvoir sur nous.



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Donc que fait-on concrètement après une crise de boulimie ?


- On passe tout de suite à autre chose, on reprend son travail et/ou on cherche une activité pour se faire du bien (sortie, ou détente avec un bain, un bon film…).


- On prend son repas suivant comme d’habitude, c’est obligatoire (si on n’a vraiment pas faim du tout, on peut adapter les quantités).


- On ne cherche pas à scruter si on a pris du poids (pesées, mesures, essayages, séances devant le miroir…).


- On se réjouit car on est en train de réapprendre à vivre normalement, et de retrouver sa santé mentale et physique ! :) :) :)



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Si on ne parvient pas tout de suite à se passer de ses mauvaises habitudes, il ne faut surtout pas se décourager : là encore, les choses peuvent s’améliorer petit à petit, à partir du moment où les principes de renutrition sont par ailleurs bien suivis. Le fait d’être correctement renourri va peu à peu corriger certains troubles mentaux qui, rappelons-le, résultent en grande partie des restrictions. Si la personne prend et

« garde » ses vrais repas, elle sera donc de plus en plus en mesure d’activer les bons comportements face aux mauvaises habitudes qu’elle peut encore avoir. En revanche, si la personne ne prend pas tous ses repas et si elle se purge quand elle fait des crises, cela peut être plus compliqué : elle entretient le cercle vicieux et risque de ne pas ressentir d’amélioration tant qu’elle ne se corrige pas, au moins en partie.


Le fait d’être motivé et fermement résolu à guérir joue ici, il faut le reconnaître, un rôle décisif. Se documenter sur les dommages irréversibles et les risques (y compris mortels) associés aux techniques de purge peut parfois aider à avancer vers une prise de conscience.





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